Première rétrospective belge de l’artiste autodidacte (Paris,1944), Christian Boltanski au MAC’s qu’il connaît depuis près de 20 ans pour y avoir créé « Les Registres du Grand-Hornu », une œuvre produite et acquise pour la collection du musée, devenue depuis sa pièce emblématique !
Je ne vais pas vous décrire toutes les impressions et sensations inhérentes à la découverte d’une telle exposition, intimement liées à ses thèmes de prédilection que sont le souvenir, la mémoire, la mort, l’oubli….
Je ne vais pas vous parler de la dimension théâtrale de la démarche d’un artiste que je vois plus comme un metteur en scène ‘affectif ‘, dramatique, mortuaire (habité aussi depuis les dernières années par la perspective de sa propre mort)…
Je ne vais pas vous expliquer les battements de cœur qui rythment assez régulièrement ses expositions, des mouvements, des lumières, des regards, des boîtes rouillées en fer-blanc, des lieux insolites où elles ont lieu et où la pénombre joue un rôle essentiel, des archives, des photos, des manteaux à travers lesquels le visiteur doit se frayer un passage pour déboucher sur un immense amas de vêtements sombres, des compteurs qui calculent la somme des secondes déjà vécue par tel ou tel quidam…
Je vais plutôt vous éclairer avec ses propres mots sur la connexion indispensable dans son chef entre l’œuvre et le lieu d’exposition, qui, je suis sûre, vont plus vous surprendre (comme moi) que tout ce que je viens de vous énumérer ci-dessus et que vous découvrirez mieux vous-même :
« Lors de ma première collaboration avec le MAC’s, j’ai téléphoné à Laurent Busine en expliquant que j’avais besoin de boites de telles tailles, d’archives et de photographies. Ensuite, je suis venu au Grand-Hornu pour installer ces éléments. Je n’ai quasiment rien fait moi-même. C’est en général, comme cela que je travaille. J’ai simplement reçu les photographies, sans véritablement m’y intéresser… Je reste toujours très peu de temps dans les lieux que j’investis… Mon travail n’est pas du tout « social » ou « sociologique »… Ce qui m’intéresse, c’est l’archivage, l’idée de dire les noms… Il m’importe -comme dans l’esprit des Mormons- de répertorier chaque individu par son nom car nommer quelqu’un, c’est lui donner la dignité d’être humain… Le nom, c’est la dernière chose qui subsiste de quelqu’un après sa mort. Je veux qu’il y ait dans mon travail une présence humaine très forte.
Une des bases de mes réflexions se rapporte à l‘importance et à la fragilité de chaque être. La mémoire de chacun disparaît très vite… Mes œuvres reprennent des gens pour qui, normalement, on ne réalise pas de monuments… Pour aller plus loin, je dirais que les gens du Grand-Hornu me sont totalement indifférents. Cela pourrait être ceux du village d’à côté, car ma démarche ne repose sur aucun désir sociologique. Je ne veux manifester aucun attendrissement particulier pour les mineurs, même si ceux-ci ont eu des vies très dures… »
Si Christian Boltanski a toujours dit que ce qui l’intéressait était la petite histoire et non la grande que l’on trouve dans les livres,
si son but est de mettre en scène celles qui nous constituent, nous ont construits, ont fait notre individualité, notre personnalité,
si ce petit savoir est à ses yeux aussi important que le grand,
si le rôle de l’artiste est de s’intéresser à cette fragilité, et de chercher à nous émouvoir à travers elle,
le pari est réussi !
On ne ressort pas indemne des expositions de cet artiste autodidacte qui nous amène subtilement à nous interroger sur le quoi, le qu’est-ce, le pourquoi de l’Histoire avec un grand H en se demandant si elle n’est pas la somme de toutes ces ‘petites’ histoires nommées modestement, discrètement entre ombre et lumière, rythme et spiritualité par le nom de chacun, sans lequel elle ne se serait jamais faite.
Son œuvre empreinte de spiritualité est totale que ce soit ici aujourd’hui au Grand-Hornu, à la Monumenta au Grand Palais en 2010, dans l’ancienne prison Ste-Anne à Avignon déjà en 1985 ou ailleurs : « Je pense que mon travail artistique est très proche de la démarche spirituelle, chrétienne même si je ne suis malheureusement pas du tout croyant… Ce qui est beau pour moi dans une lampe ou une bougie, c’est qu’elle évoque la vie, la force, le feu, etc. mais qu’en même temps, il suffit de souffler ou toucher l’interrupteur pour éteindre. Cet alliage de force et de fragilité est une chose commune à toutes les spiritualités du monde, à toutes les religions. »
Et enfin, si le titre de l’exposition, « La Salle des pendus » vous effraie (à raison), sachez qu’il s’agit seulement du terme par lequel on désignait le vestiaire où se changeaient les mineurs. Avant de descendre dans la mine, ils accrochaient leurs vêtements au plafond au moyen d’un crochet ce qui donnait à la pièce une allure un peu effrayante que Christian Boltansky a interprété à sa manière. Avec génie et respect à la fois.
L’annonce du Mac’s
CHRISTIAN BOLTANSKI, UN ARTISTE PROCHE DU MAC’S
L’histoire liant le MAC’s et Christian Boltanski est longue puisqu’elle remonte à 1997. C’est, en effet, avant même l’ouverture de l’institution qu’une commande fut passée à l’artiste français.
Son oeuvre Les Registres du Grand-Hornu est la première pièce produite et acquise pour la collection du musée. Elle est devenue depuis sa pièce emblématique.
En 2001, Denis Gielen, à l’époque assistant de Laurent Busine, l’interviewe sur son oeuvre et son ressenti par rapport au site du Grand-Hornu.
A l’occasion de l’ouverture de Mons 2015, Capitale européenne de la Culture, le MAC’s propose à Christian Boltanski sa première grande exposition muséale en Belgique.
La manifestation qui occupe plus de 5000 mètres carrés, investit l’ensemble des salles du musée ainsi que l’ancien magasin aux foins du Grand-Hornu qui représente, à lui seul, une surface près de 1000 mètres carrés.
Les Registres du Grand-Hornu y tiendront bien entendu la place qu’ils méritent en tant que pièce centrale de la collection du musée.
Le reste de l’exposition continue à explorer les thèmes de la mémoire et du souvenir en proposant une série d’installations réalisées à base de vêtements, matériaux évoquant aussi chez lui le thème de la mort.
Commentaire-commentaar Ferdinand Neve
Le Grand Hornu – BOLTANSKI.
C’est une performance remarquable de pouvoir résumer en quelques scènes l’aventure minière des années d’avant guerre, ses sacrifices humains, la pénibilité quasi insoutenable du travail, mais aussi la solidarité entre les gens du fond, illustrée par ces battements de cœur que le visiteur entend le long de la visite.
Un vieil ingénieur des Mines, qui avait fait presque toute sa carrière au fond, me disait un jour : ” la mine est comme un corps humain, toutes ses facultés doivent s’unir pour qu’elle vive.” L’idée du battement de cœur interpellant le visiteur colle donc tout à fait à la réalité.
La recherche esthétique dans cette exposition thématique est subsidiaire au sujet ; toutefois, une vareuse de mineur – en croix – entourée de lumières ne fait que accentuer l’idée du sacrifice humain ; c’est beau et émouvant .
Et celle ci est suivie d’un terril énorme de vareuses de mineurs. Ne seraient-ils donc que des déchets ?
Impressionnant.
In enkele grootschalige scènes vat BOLTANSKI het menselijk avontuur samen in de mijnen van Wallonie en dit is geen kleine prestatie. De slachtoffers, de onvoorstelbare arbeidsvoorwaarden, maar ook de immense solidariteit van de “put” worden hier geïllustreerd door de hartslagen die de bezoeker begeleiden tijdens het bezoek.
Ooit vertelde mij een oud ingénieur die het beste van zijn carrière in de put had doorgebracht : “de mijn gelijkt op een menselijk lichaam : alle organen moeten hun krachten bundelen om te leven”. Het idee van de hartslagen klopt met de realiteit.
Wie esthetiek wil vinden in deze expo zal allicht teleurgesteld zijn ; het centraal thema duwt het mooie op de zijkant, maar een mijnwerkersjas in kruis, omringd door licht , benadrukt het idee van de opoffering : t’ is mooi en ontroerend.
En dit wordt gevolgd door een terril samengesteld uit duizenden jassen. Zijn die mensen dan slechts afval ?
Indrukwekkend. En de site is geweldig.
ARCHOTEQUE MONS
Un flop de première : le bâtiment neuf construit à l’intérieur de La Chapelle du Couvent des Ursulines n’est pas accessible au public.
Les collections digitalisées ne s’adressent qu’à un public de chercheurs.
A oublier.
Informations pratiques
Jusqu’au 16/08/15
Site du Grand-Hornu 82, Rue Ste-Louise B-7301 Hornu. Tél. : +32 65 65 21 21.
Ouvert tous les jours sauf le lundi de 10h à 18h. Entrée : 8 EUR (billet combiné).
Gratuit le 1er dimanche du mois.
E-mail : accueil.site@grand-hornu.be
A noter :
Nocturne de l’art le vendredi 3/04
Conférence sur l’art conceptuel le dimanche 5/04
www.mac-s.be
FUTUR ARCHAÏQUE
Si vous ne savez pas ce qu’est un oxymore en français… vous l’avez sous les yeux et ne risquez plus de l’oublier ! Il s’agit d’une figure de style qui associe deux mots qui ne vont à priori pas ensemble, que tout oppose comme par exemple une rétrospective prospective ou un… futur archaïque !
Refuser le progrès ou faire fusion avec lui ? Tel pourrait être le postulat de cette exposition originale. A une époque où l’on voit s’éteindre les ressources naturelles au profit de l’informatique et ses dérivés comme l’imprimante 3D, quelques artistes, architectes, designers sous l’égide de Marie Pok, directrice du CID au Grand-Hornu et Chantal Prod’hom, son homologue du mudac de Lausanne ont réalisé une série de projets alliant techniques artisanales et numériques en résonance avec les besoins de notre société actuelle.
Une exposition conçue comme un dialogue entre technique et artisanat, hommes et machines, sciences et poésie, futur et passé, comme un retour au commencement dans une perspective dynamique.
60 pièces mises en situation par Winston Spriet sous un éclairage magnifique témoignent de manière exceptionnelle, au propre comme au figuré, de la capacité de l’homme à se réinventer en retrouvant ses racines : « retrouver sa part animale qui n’est autre que l’instinct avec laquelle il était temps de se reconnecter » pour reprendre les mots d’Yves Mirande, journaliste spécialiste du design.
Mentions spéciales pour les pierres taillées ajustées dans des pièces en impression 3D (2012) de Ami Drach & Dov Ganchrow et le jeu d’échec « Log Chess Set » en branche et planche de bois (2009) de Peter Marigold.
Jusqu’au 19/04/15
CID-Centre d’innovation et de design du Grand-Hornu
Site du Grand-Hornu 82, Rue Sainte-Louise B-7301 Hornu
Ouvert tous les jours sauf le lundi de 10h à 18h.
Entrée : 8 EUR (billet combiné). Gratuit le 1er dimanche du mois.
Visites guidées sur réservation
info.cid@grand-hornu.be
www.cid-grand-hornu.be
[1] extraits de « L’Emotion » paru en 2001