Il y a tellement à dire sur cet personnalité majeure de l’avant-garde européenne de la seconde moitié du XXe siècle qui, entre textes et images a inventé un style qui lui est propre non sans avoir entraîné dans son sillage quelques-uns des plus grands artistes de l’époque comme Asger Jorn, avant la fondation officielle de CoBrA en 1948. Dans la foulée, suivront Pierre Alechinsky, Corneille, Karel Appel et Hugo Claus, pour ne citer qu’eux. On fête cette année le centenaire de la naissance – le 12 décembre 1922 à Tervuren – de ce peintre de l’écriture qui a pas mal voyagé dans la péninsule scandinave jusqu’en Finlande dont il s’éprit avec passion de la Laponie représentant à ses yeux un vaste laboratoire expérimental à ciel ouvert. Il va jusqu’à réaliser en 1963 des logoneiges, tracés à même la nature. Deux photos sont là pour en témoigner.
Passant au cours de ses tentatives graphiques du pastel coloré, à l’encre ordinaire, à l’encre de Chine appliquée à la plume, puis au pinceau jusqu’au tube lui-même sans plus d’intermédiaire, Dotremont recherche avant tout « l’unité verbale-graphique », celle d’un véritable cheminement qui part du lisible vers le visible pour aboutir au logogramme. Aboutissement d’un geste naturel qui devient expression poétique à part entière. Et il ne s’autorise aucune retouche. J’aime l’idée, le concept de peintures-mots. Il a commencé à le pratiquer dans les limites de la page avant d’adopter la position debout. Rappelons qu’il s’inscrit aussi naturellement à la suite de Guillaume Appolinaire et ses calligrammes, Fernand Léger, Picasso et Magritte, une génération qui s’est passionnée avant lui pour le signe scriptural. A la fois à la fois écrivain, poète, peintre, calligraphe, Christian Dotremont a aussi voyagé, donnant à son activité une dimension internationale. Sa renommée n’a malheureusement pas été à la hauteur de son talent et il reste encore trop méconnu, conséquence sans doute de son parcours atypique et de son refus d’appartenir à des catégories bien définies.
Cette exposition consacre un artiste hors norme à la démarche originale, un poète graphique dont le génie n’a pas échappé à Pierre Alechinsky qui l’a soutenu tout au long de sa vie, allant jusqu’à acheter incognito ses œuvres avant les vernissages pour susciter une émulation. Une importante part des œuvres exposées provient d’ailleurs de la collection personnelle du peintre et graveur belge (naturalisé français), qui vit à Bougival et travaille encore à 94 ans.
Texte & Photos Virginie de Borchgrave
Jusqu’au 7 août 2022
Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique
3, Rue de la Régence
B-1000 Bruxelles
Ouvert du mardi au vendredi de 10h à 17h ; les weekends de 11h à 18h.
www.fine-arts-museum.be
“Tanya Goel. Optics and Duration” **
Juste avant de descendre les escalators pour accéder aux salles de l’exposition Dotremont, sur votre droite, une salle présente régulièrement des artistes passionnants. Il s’agit cette fois-ci d’une artiste indienne (1985, New Delhi) qui réalise de grandes œuvres très graphiques, colorées et lumineuses, aussi denses que complexes explorant l’abstraction et son univers spécifique. Sa démarche est intéressante car elle fabrique elle-même ses pigments avec des matériaux divers tels que du béton, du verre, du mica et même des feuilles qu’elle récolte sur les sites de démolition de sa ville natale.
Elle élabore une peinture sérielle qui m’a rappelé certaines toiles de Gerhard Richter mais aussi d’Agnès Martin ou Josef Albers qui était à l’honneur à Paris au MAM, l’automne dernier.
Une artiste qui transforme par sa créativité le chaos urbain en une œuvre géométrique et minimaliste où dialoguent entre eux les antagonismes « contrôle et intuition, rigueur et liberté, structure et chaos. »
Texte & Photos Virginie de Borchgrave
Jusqu’au 7 août 2022
Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique
3, Rue de la Régence
B-1000 Bruxelles
Ouvert du mardi au vendredi de 10h à 17h ; les weekends de 11h à 18h.
www.fine-arts-museum.be
