« Magritte, Broodthaers & Contemporary Art »
« La moule, cette roublarde qui a fui le moule de la société » Inutile de vous spécifier qui a écrit cela !
Nous voilà dans l’exposition phare qui clôt l’année ‘Hommage à Magritte’ organisée pour le 50e anniversaire de sa mort. A la question de savoir quel a été son héritage dans le monde de l’art, Michel Draguet, le commissaire en collaboration avec Charly Herscovici de la Fondation Magritte et Maria Gilissen, la veuve de Broodthaers ont choisi de répondre en confrontant les œuvres du maître à celles d’artistes modernes et contemporains. Dans un brillant dialogue/face à face/mise en abîme -on l’appellera comme on veut-, l’exposition met le doigt sur l’influence de René Magritte qui continue d’intriguer et d’interroger le monde artistique, 50 ans après sa disparition. 150 oeuvres illustrent le propos pertinent dont le fameux tableau « Ceci n’est pas une pipe » intitulé « La Trahison des Images » qu’on n’avait plus vu en Belgique depuis 45 ans ! Avec Marcel Broodthaers en chef de file de ses fils spirituels avec qui il a beaucoup partagé et échangé mais aussi, des artistes comme les Américains Jasper Johns, Robert Rauschenberg, Ed Ruscha, Robert Gober, l’artiste conceptuel allemand Joseph Beuys, le Français Arman, l’alchimiste gantois Leo Copers, etc.
Jeu de décortication des images, du langage, confrontation de l’écriture d’un mot et son image, distinction entre une chose et sa représentation, détournement didactique, différence entre ce qu’on est et ce qu’on paraît ou encore, représentation d’objets du quotidien démesurément agrandis comme le peigne, le blaireau, l’allumette, le verre dans « Les Valeurs personnelles » de Magritte, des objets qui n’ont pas pris une ride, toujours terriblement actuels, etc., l’exposition est tout cela. Elle pose aussi en filigrane la question de savoir que peindre après Magritte -comme on s’est posé la question de savoir qu’écrire après Cervantès, Dostoïevski, Flaubert ou Proust ou que composer après Mozart ou Beethoven…
On ressort de là avec l’esprit en éveil, qui scintille et luit comme le soleil de la dernière et l’une des plus belles toiles de l’exposition, intitulée « L’au-delà » (1938) représentant la tombe de Magritte sous un beau soleil qui irradie. Alors, chaleur qui consume tout ou lumière d’espoir et de bonheur ? « Le soleil luit pour tout le monde, même pour les morts » nous dit Jean-Phillipe Theyskens, historien de l’art (et frère d’Olivier, l’un de nos plus célèbres couturiers) qui nous a guidé dans l’exposition en nous ouvrant des perspectives à l’infini… du soleil à la lune !
« Magritte a rendu la pensée visible, c’est pourquoi sa peinture est universelle » conclut-il brillamment.
Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique
3, Rue de la Régence
B-1000 Bruxelles
Ouvert du lundi au vendredi de 10h à 17h et les samedi et dimanche de 11h à 18h. Fermé le 1/11, 11/11, 25/12/2017 & 1/01, 11/01/2018
Entrée : 14,50 EUR plein / 12,50 EUR réduit
www.fine-arts-museum.be
ADDENDUM
par P Kluyskens
J’ai été voir également cette belle exposition; j’ai par contre un grand bémol: si vous avez – comme moi (j’avoue humblement) – un peu ou beaucoup de difficultés à ‘ entrer ‘ dans l’oeuvre de Broodthaers, ce n’est pas avec les explications de l’expo que vous comprendrez mieux son oeuvre. C’est très complexe et même après avoir lu nombre d’analyses, cela reste confus. Magritte en comparaison, se lit comme un livre d’enfants.
Draguet & co auraient pu mettre plus l’accent sur le décodage des oeuvres; c’eût été une occasion unique mais c’est donc un rendez-vous raté.