Après des institutions comme la Serpentine Gallery à Londres en 2011, le Hammer Museum de Los Angeles en 2013, d’autres au Canada, en Allemagne, au Palais de Tokyo à Paris, Mark Leckey envahit sur 2 étages le Wiels à Bruxelles cet automne. La plus grande rétrospective consacrée à ce jour à cet artiste britannique né en 1964 à Birkenhead (près de Liverpool) et considéré aujourd’hui comme l’un des plus importants de la génération 90, surtout depuis qu’il gagna en 2008 le prestigieux Turner Art Prize.
Sous un titre poétique “Enchanter la matière vulgaire“, tiré d’une lettre de Guillaume Apollinaire à l’incroyable et original réalisateur français Georges Méliès (considéré comme l’un des principaux créateurs des premiers trucages au cinéma) où le poète lui parle de leur désir commun d’enchanter la matière vulgaire, l’exposition montre toutes sortes d’objets dont un immense Felix le Chat devant lequel tous les petits enfants présents au vernissage restaient muets de fascination. Mais que veut-il dire en reprenant ces mots? A en croire Dirk Snauwaert, le directeur du Wiels, Mark Leckey s’en est donné à coeur joie et ne s’est jamais autant lâché dans une exposition, preuve évidente qu’il se sentait libre ici et en harmonie avec le lieu. Les galeristes qui le défendent à Londres n’en reviennent pas non plus. Je dois dire que j’étais moi-même un peu perdue. Alors? Déambuler dans l’exposition apporte quelques réponses… On se sent certes interpellé, on découvre une fascination omniprésente pour les choses matérielles et immatérielles, un artiste qui passe au crible l’iconographie de la culture populaire à travers ses marques et ses produits en cherchant à analyser l’effet -l’attraction affective pour reprendre les mots du communiqué de presse- qu’ils exercent sur nous.
Une mention spéciale pour l’Auditorium qui passe presque tous ses films, dont son hommage à la culture des dancings “Fiorucci Made Me Hardcore” avec laquelle il a fait un retour remarqué en 1999 après une dizaine d’années où il n’avait rien produit. On y découvre ses autres films très rarement projetés. Une part de l’exposition à ne pas négliger, la plus importante à mes yeux pour appréhender le travail de cet homme hors du commun qui fut maître de conférences en arts plastiques à l’Université Goldsmiths à Londres d’où sont sortis une pléiade d’artistes célèbres.
Très personnelle, la démarche de Leckey est aussi critique que divertissante. Là est peut-être l’intérêt.
N.B.: Visite à combiner avec celle de l’artiste belge Ana Torfs (jusqu’au 14/12)… Rien que pour le contraste saisissant entre les deux expressions artistiques aux antipodes.
L’annonce du Wiels:
Enchanter la matière vulgaire est la plus grande rétrospective à ce jour de Mark Leckey. Avec ce titre, inspiré d’une lettre de Guillaume Apollinaire dans laquelle ce dernier déclare que le réalisateur Georges Méliès et lui-même “enchantent la matière vulgaire”, l’artiste identifie une impulsion similaire au coeur de son propre travail. C’est précisément ce que met en lumière cette exposition en réunissant son œuvre passée et récente, dans toute la diversité des médias avec lesquels il a travaillé. Etalée sur deux étages du WIELS de même que dans l’Auditorium, l’exposition présente la quasi-totalité des films de Leckey, y compris son désormais emblématique hommage à la culture des dancings Fiorucci Made Me Hardcore (1999) et d’autres rarement projetés, de même que des objets représentatifs de son travail de ces dix dernières années, proposant ainsi une vue d’ensemble longtemps attendue de l’oeuvre remarquable de Leckey.
Une installation entièrement nouvelle,UniAddDumThs, sera par ailleurs dévoilée, agissant comme une sorte d’exposition de copies organisée par l’artiste au sein de l’exposition. Cet ensemble révèle la fascination de l’artiste pour l’émotion que déclenchent en lui les choses, qu’elles soient matérielles ou immatérielles, précieuses ou ‘vulgaires’, de même que pour l’exploration de leur lien au désir, au fantasme, à l’identité et au souvenir.
Au sujet de l’artiste
Né en 1964 à Birkenhead (Royaume-Uni), Mark Leckey vit et exerce actuellement à Londres. Lauréat du prestigieux Turner Prize en 2008, l’artiste a fait ses études au Newcastle Polytechnic et a été maître de conférence en arts plastiques à l’Université Goldsmiths de Londres. Il a enseigné les études cinématographiques à la Städelschule de Francfort-sur-le-Main de 2005 à 2009.
Enchanter la matière vulgaire est organisé par WIELS. L’exposition sera le sujet d’un séminaire organisé par Museo d’Arte Contemporanea Donnaregina-Madre, Naples (hiver 2014-15) et UniAddDumThs voyagera à la Kunsthalle Basel (5 mars-31 mai, 2015).
Publication
Mark Leckey – On Pleasure Bent, le premier catalogue raisonné consacré à l’œuvre de l’artiste anglais, accompagne l’exposition. Tous les scripts de l’artiste apparaissent ensemble pour la première fois dans cet ouvrage richement illustré, qui contient par ailleurs de nouveaux essais ainsi qu’un entretien avec l’artiste. Il est conçu par Sara de Bondt Studio et co-publié par WIELS, Haus der Kunst, Munich et Museo Madre.
Commissaire de l’exposition : Elena Filipovic
Informations pratiques
Jusqu’au 11 janvier 2015 au WIELS Centre d’Art Contemporain 354, Avenue Van Volxem B-1190 Bruxelles.
Tél.: +32 340 00 53. Du mercredi au dimanche de 11h à 18h. Nocturne jusqu’à 21h chaque premier et troisième mercredis du mois. Fermé les lundis et mardis. Entrée: 8 EUR. Gratuit tous les premiers mercredis du mois. Visite guidée le dimanche à 15h. www.wiels.org