MARK ROTHKO & PIET MONDRIAN
D’emblée deux remarques.
La première: l’exposition est un événement -première de l’artiste aux Pays-Bas de puis 40 ans!- et c’est bien pour cela que nous nous sommes déplacés jusqu’à La Haye. Mais quelle surprise en découvrant le Musée Municipal, perle de l’architecture art déco, dans un état incroyable où tout a été admirablement conservé, préservé, rénové en gardant l’âme du bâtiment. Rien que pour le musée inauguré en 1935 (même époque que Flagey), un an après la mort de l’architecte H.P. Berlage, le déplacement vaut la peine surtout qu’il présente régulièrement des expositions intéressantes.
La deuxième: la collection des Mondrian que possède ce musée de La Haye est la plus importante au monde (300 toiles) et l’équivalent de celle que possède le MOMA en Rothko (19 toiles). D’où la pertinence de cette exposition qui analyse e.a. l’interaction entre les deux pionniers de l’abstraction européenne et américaine -Rothko appelait Mondrian “l’artiste le plus sensuel que je connais“- même si la démonstration n’est pas tout à fait convaincante. (Il ne s’agit que d’une salle.)
Enfin, maintenant quelques réflexions sur l’exposition elle-même qui commence par des toiles peu connues des périodes qui précédent la période ‘classique’ dite de l’abstraction. Ensuite, on assiste à la mise en place de la spatialité et de la couleur, de la géométrie des formes au travers de ces carrés chromatiques aux couleurs fortes. On apprend l’influence que Nietzche eut sur le peintre après la lecture de “La Naissance de la tragédie” où le philosophe explique que la tragédie grecque n’est autre qu’une recherche humaine pour racheter les terreurs d’une vie mortelle. En écho, Rothko dira : “l’expérience tragique ragaillardie est la seule source de l’art.“
Quelques grandes salles montrent les peintures des années 50, 60 essentielles dans son parcours puis, admirablement mises en scène, quelques alcôves mettent chacune une toile en valeur tout en laissant respirer les couleurs. Des bancs qui font partie intégrante du bâtiment nous permettent de s’asseoir pour apprécier leur vibration. Une présentation qui aurait certainement plus au professeur, qui de 1929 à 1952 enseigna l’art aux enfants.
Après cette série, en rentrant à nouveau dans une grande salle, de part et d’autre de l’entrée, remarquez les deux petits formats, réalisés à la fin de sa vie lorsque ses problèmes de santé ne lui permettaient plus de peindre de grands formats. Des merveilles d’équilibre, de couleur, de fluidité dans des tons très différents.
Dans la dernière salle, de très grandes toiles à la palette sombre, réalisées pour des commandes spéciales, exercent sur nous cette fascination que l’on a pour le peintre qui a sublimé la forme par la couleur.
Magnifique exposition où l’on déambule tranquillement en comprenant peut-être pourquoi Mark Rothko disait que la peinture est aussi naturelle que le chant ou la parole…
Pour une préparation minutieuse de l’exposition, lire le livre publié par Annie Cohen-Solal l’année dernière chez Actes Sud, intitulé “Mark Rothko“.
Jusqu’au 1er mars 2015
Gemeente Museum
Stadhouderslaan, 41
Den Haag
Tél.: +31 70 338 11 11
Mardi-dimanche: 11h-17h
Fermé le 25/12